La genèse du couteau corse
La genèse du couteau corse
Le couteau corse pliant est issu d'une tradition qui se veut être séculaire. Au début il se définit comme un outil et occasionnellement comme une arme, (suppléant parfois au fameux stylet) . Le couteau corse pliant en tant qu'objet « normé » n'existe pas et n'a jamais existé. En effet il s'élabore généralement avec les matériaux que l'on a sous la main.S'il est vrai que la corne, qui se retrouve à profusion au sein d'une société agropastorale, entre à 80 % dans la fabrication des manches, il n en demeure pas moins vrai que les bois locaux sont utilisés par « qui n'a pas de cornes sous la main ».En ce qui concerne la lame elle est souvent usinée à la meule à eau car fabriquée à partir de reliquats d'outils cassés ou usés.Très vite chacun l'adapte à ses besoins et ses envies. On n'hésite pas à le « moderniser » en en changeant forme, taille ou aspect. Une idée reçue voudrait que le forgeron façonne les couteaux corses pliants de sa Piève (micro région) ...S'il le fait ce n'est que très occasionnellement. En effet,peu de paysans ont les moyens de « s'offrir ce luxe ». Ils se contentent ordinairement de façonner les bouts d'outils forgés cassés ou trop usés comme dit précédemment selon leur dextérité et leur habileté il en résultera un couteau plus ou moins réussi.... mais dont l'utilité elle, sera avérée et l'usage quotidien. Le couteau corse pliant originel n'est donc pas plus « normé » qu'obligatoirement forgé.On peut même affirmer qu'il est à 80 voire 90 % usiné à la meule à partir de fer (forgé ou non sur place) ou de simple ferraille de récupération
Le couteau corse et le Riacquistu
Les années 70 dites « du Riacquistu » en Corse,refont la part belle au couteau corse avec entre autres Joseph Antonini dit "Jo Couteaux" en Haute Corse et Paul Santoni Corse du Sud. Ces couteliers de renom dont personne ne remettrait le travail en cause ne forgeaient que très peu voire rarement leurs créations. Ils les usinaient par le biais de différents outils qu'ils fabriquaient certaines fois eux même.L'engouement du renouveau de la coutellerie insulaire poussera plusieurs autres couteliers à s'installer et à développer une activité coutelière qui ne cessera de créer des émules depuis. Couteliers forgerons ou couteliers façonneurs...Cette démultiplication à permis au couteau corse pliant de se moderniser et de s'adapter à son temps.Formes,matières,matériaux,fonctions se sont ainsi libérés pour convenir aux besoins de son utilisateur. En effet le couteau corse pliant ou non, ne doit pas se figer dans un état qui pourrait être qualifié « d'archaïque» s'il veut convenir aux jeunes générations d'utilisateurs.
Qu'il y ait une partie de la production qui soit fidèle à la Tradition et au Savoir-Faire de nos anciens est plus que nécessaire pour perpétuer Mémoire et Culture et asseoir l'évolution de cette filière sur des bases sûres et solides. Cependant il est autant nécessaire qu'une évolution vers la Modernité et la Contemporanéité se fasse pour ne pas tuer à petit feu une de nos richesses patrimoniales. Il ne faut pas au nom du Savoir-Faire souhaiter « normer » et restreindre la Création en l'enfermant dans un carcan que l'on érigerait en Mesure Étalon, car on risquerait d'étouffer le couteau corse en le standardisant et en le figeant dans un temps qui ne correspondrait plus aux attentes des utilisateurs contemporains de l'objet. Il en est d'ailleurs pour l'Artisanat comme pour l'Art, les Langues ou la Gastronomie ….la nécessité d'Adaptation est unes des conditions de la Survie.... du Développement et de la Pérennisation.. Voilà pourquoi entre autre le couteau corse ne doit pas déroger à la règle de la Modernisation . Une Modernisation qui sera cependant contrôlée et soumise à des critères de Qualité drastique. Une Qualité que chaque Artisan à cœur de prendre comme fer de lance de sa démarche de Création. A Bon Entendeur Salut ...dit un vieil adage ..
Patrick Tozzi